Dans son acception la plus répandue aujourd’hui, le paysage renvoie invariablement au rapport sensible ou à la relation esthétique que l’on entretient avec l’environnement naturel. Peut-on envisager de dégager quelques aspects essentiels du paysage à partir d’un lieu spécifique, le paysage tel qu’exprimé dans les photographies récentes de Raymonde April ? Pourquoi pas ? Il s’agit ici d’une conception particulière du paysage, une sensibilité qui privilégie un rapport affectif à la nature de l’espace habité.

Le corpus photographique de Bifurcations, réalisé en 2004 par Raymonde April, est constitué de deux grandes catégories d’images. Il y a tout d’abord une série d’images individuelles (Sentier national) qui se présentent comme une succession de variations sur le paysage. Un autre regroupement d’images (Dix images seules) montre des scènes de la vie en famille et de furtifs moments vécus entre amis. Si la première catégorie d’images aborde la question de la familiarité des lieux et les réminiscences qu’ils suscitent, la deuxième catégorie prend une tout autre direction et fonctionne plutôt comme de longues séquences panoramiques (Inconsciences, Les rêves de la raison). Dans ces séquences, l’artiste élabore, en un patient jeu de permutations, une prose visuelle dominée par le principe de discontinuité. (Jean-Claude Rochefort, commissaire)


In its most widespread sense today, “landscape” invariably refers to our tangible connection to aesthetic relationship with the natural environment. Is it possible to tease out certain essential aspects of “landscape” from a specific site – the landscape as expressed in Raymonde April’s recent photographs? Why not? She offers a particular conception of the landscape, a sensitivity that encourages an emotional tie to the nature inhabiting the space.

The photographic corpus of Bifurcations, produced in 2004 by Raymonde April, is formed of two general categories of images. First, there is a series of individual pictures (Sentier national), which is presented as a succession of variations on the landscape. Another group of pictures (Dix images seules) shows scenes of family life and furtive moments stolen between friends. While the first category addresses the issue of the familiarity of places and the memories that they evoke, the second category takes a completely different direction, in which images function as long panoramic sequences (Inconsciences, Les rêves de la raison). In these sequences, the artist devises a patient play on permutations, a visual prose dominated by the principle of discontinuity. (Jean-Claude Rochefort, curator)